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Conseil juridique: la convention de porte-fort

Question:

La question générale suivante a été posée au service juridique:

Je traduis régulièrement pour des avocats. Ils me demandent parfois d’établir ma facture au nom de leur client. Si mon «client» ne paie pas, je fais pression sur l’avocat.

Mais qu’en est-il si je n’ai d’autre choix que de saisir le tribunal pour défaut de paiement du client? Je n’ai en effet passé aucun contrat avec le client… Puis-je m’adresser à l’avocat?

Réponse:

Les articles 1119 et 1120 du Code civil belge prévoient les dispositions suivantes:

Art. 1119. On ne peut, en général, s’engager, ni stipuler en son propre nom, que pour soi-même.

Art. 1120. Néanmoins on peut se porter fort pour un tiers, en promettant le fait de celui-ci ; sauf l’indemnité contre celui qui s’est porté fort ou qui a promis de faire ratifier, si le tiers refuse de tenir l’engagement.

L’article 1120 transposé à une situation comme celle-ci signifie donc que vous avez le droit d’interpeller l’avocat. Il s’est en effet «porté fort» pour son client.

La convention de porte-fort est une clause par laquelle une partie contractante s’engage vis-à-vis du co-contractant à veiller à la prestation ou à l’abstention d’un tiers. Il est donc très important que vous puissiez prouver par la suite que cette promesse a effectivement été faite. Conservez précieusement l’ensemble des courriers échangés à ce sujet.

Le tiers n’étant toutefois pas lié par la convention de porte-fort, il se pourrait que ce tiers ne respecte pas l’engagement de votre porte-fort. Sans l’accord du tiers, le porte-fort sera tenu de vous dédommager.

En revanche, le tiers est lié par le contrat dès lors qu’il l’a ratifié tacitement ou explicitement, en vous apportant, par exemple, son concours dans une traduction. Dès que l’accord du tiers est obtenu, le porte-fort a honoré son engagement et, dès lors, est quitte du lien juridique. Si des problèmes surviennent ultérieurement dans la relation avec le client, le porte-fort ne pourra plus être inquiété.

Si un porte-fort vous garantit donc le paiement d’une facture par un client et que ce dernier n’honore pas ses engagements, vous pouvez en principe interpeller le porte-fort. En revanche, si une porte-fort vous assure du paiement d’une facture par un client et que le client en question consent à cet engagement, le porte-fort est libéré du lien juridique. Si le tiers ne vous paie finalement pas, il sera la seule personne à qui vous pourrez vous adresser.

Attention: si la facture que vous envoyez n’est ni acquittée ni contestée dans un délai raisonnable, un juge pourrait en déduire que le client a bel et bien accepté l’obligation de payer. Dans ce cas de figure, le porte-fort ne pourra plus être interpellé.

Deux exemples:

  1. Un porte-fort vous confie une traduction et vous promet qu’un tiers vous paiera. Vous traduisez le texte sans intervention du tiers. Vous envoyez la facture au tiers (ex. client du porte-fort). Le tiers tombe des nues et prétend n’être au courant de rien. Dans ce cas, vous pouvez interpeller le porte-fort.
  2. Un porte-fort vous confie une traduction pour un tiers. Pour cette traduction, vous travaillez en étroite collaboration avec ce tiers qui refuse par la suite de vous payer. Dans ce cas de figure, il paraît difficile de vous adresser à nouveau au porte-fort étant donné que le tiers a clairement ratifié le contrat (tout au moins tacitement) en offrant son concours.

Disclaimer : ceci est un premier avis donné avec une connaissance limitée du dossier et non pas un conseil juridique concret dans le cadre d’une procédure. Pour transposer concrètement cet avis à la présente situation de fait, nous vous invitons à consulter votre/vos conseiller(s) personnel(s).

Nous remercions Laurence Englebert et Pascale Pilawski pour la traduction bénévole.